A sarpaia – Poème d’Alain Di Meglio

Après avoir reçu, avec joie, des nouvelles de ma cousine Nolwenn installée sur l’île de beauté, ma curiosité s’est penchée sur les poètes corses contemporains.

J’ai découvert une île-muse qui envoûte et inspire… La poésie corse flirte généralement avec le chant : le lyrisme au service d’un éloge de leur terre !

Les corses écrivent leur île avec panache. Ils sont fiers de ses charmes, défenseurs de sa langue et passeurs de ses trésors culturels.
Contre tout préjugé, je suis agréablement surpris de ne croiser au fil de mes lectures que de rares textes empreints de messages politico-indépendantistes…

Les poèmes « Marcher » de Lucia Santucci et « Rêve » de Ghjacumu Fusina sont intenses. Et je suis particulièrement sensible à ceux d’Alain Di Meglio. Ses mots me font voyager, vers une terre que je ne connais pas encore (ça ne saurait tarder…) :

A SARPAIA

Drentu a nioti sitimbrina
Suta à üna lüna fina
U portu mi pari ün stagnu
Ogi è giurnu di cucagna
Cian cianin ün schifu và
Sciorti ün schifu à piscà.

Maestusa è a noscia Roca
Fiera di ri se palazzi
Nantu à u ciazzà di San Rocu
Ün veciu guarda a bunazza
Ciaciarigia in tera in tera
U Diu Grossu cù a Galera.

Da San Franzè à i Trè Punti
U tempu avirà scavaiu
Questu lungu lungu frunti
Cù ventu e mà scadenai
Là, deria, da Cara Sciumara
Vedu zà u sun che sbara.

O che liogu è Sant’Antoniu
Cù u schiogiu pertüsaiu
Ancu l’Orca e u se tafonu
È ün magu che r’hà faiu
In questu liogu, a natüra
G’hà missu tüta a primüra.

Cara di Labra anaquaia
D’egua duzzi, fresca e sana
Da ciapili imbarsamaia
U Grandi Spirun si spana
Ciaza bela e fina orena
Ancu buna pè i reni.

Atrazinu i Ratini
Vanu apressu à u Cavalu
I Lavezi sun visgini
Cù l’osgili fanu ün balu
E si stà suta à l’incantu
A belezza è d’ogna cantu.

Suta à a Ciana di l’Inglesi
G’avemu trè tinimenti
Sarpa sarpa i te rei
Capun ghi n’è ciü di trenta
I fundi sun ricamai
Lüsgi a sarpa cù l’ogiaia.

L’Isuri cù a bunazza
E ti sbuchi in paradisu
Üna timpesta e t’amazza
È cuscì u me paisi
U piali s’infiara d’oru
Si cridimu indè üna fora.

Ogi a pesca è staia buna
Smagiremu di riturnu.

Alanu Di Meglio, in l’album Bunifazziu in Cantu, I Gargarozzi – C.di Meglio/A. di Meglio, Association Atelier Di ghi di scé, Studio Fa Dièse Corsica, Porticcio, 1999

A sarpaia - poésie corse

Si vous êtes comme moi, avide de compréhension, voici une traduction :

A SARPAIA
(Remontée des filets)

Dans la nuit de septembre
Sous un filet de lune
Le port est comme un étang
La journée s’annonce superbe
Tout doucement une barque glisse
Une barque sort.

La falaise est majestueuse
Fière de ses bâtiments
Sur la placette Saint Roch
Un vieux contemple la mer calme
Tout près de la côte
Le Diu Grossu et la Galère se parlent.

Depuis Saint François jusqu’aux trois Pointes
Le temps a dû creuser
Ce front immense
Avec le vent et la mer déchaînés
Là-bas, derrière, de Cara Sciumara
Je vois déjà le soleil qui apparaît.

Saint Antoine, Quel endroit !
Avec son rocher percé
Avec l’Orca et sa vasque
C’est un magicien qui les a créés
En ce lieu la nature
A mis tout son génie.

Les Ratini approchent
Ils courent après Cavallo
Le Lavezu n’est pas loin
Et danse avec les oiseaux
Et on tombe sous le charme
La beauté est partout.

Sous le récif des Anglais
Nous avons trois chapelets
Tire, tire tes filets
Il y a plus de trente chapons
Les fonds sont comme brodés
La saupe et l’oblade luisent.

Les îles par beau temps
T’ouvrent les portes du paradis
Mais la tempête est mortelle
Ainsi est mon pays
Le plateau s’embrase d’or
C’est un monde fabuleux.

Aujourd’hui la pêche a été bonne
Nous démaillerons au retour.

Alain Di Meglio, in l’album Bonifacio en chanson, I Gargarozzi – C.di Meglio/A. di Meglio, Association Atelier Di ghi di scé, Studio Fa Dièse Corsica, Porticcio, 1999


Clefs : Corsica | puesia | langue régionale | Méditerranée |  pêcheur | aube
Partager
Facebooktwitterredditpinterestlinkedintumblr
Lien pour marque-pages : Permaliens.

2 Commentaires

  1. Bravo pour ces documents littéraires : est-il possible de les exploiter en tant que prof de français ? Peut-être faudra-t-il demander à Léo s’il est d’accord avec la traduction du poème corse car il l’apprend à l’école !
    Signé Martine, l’amie de Pascal, lui-même papa de Nolwenn !

    • Guillaume Riou

      Bonjour Martine,

      Je suis heureux de faire votre connaissance et vous remercie pour votre commentaire.

      Il est possible d’exploiter, à titre pédagogique et non lucratif, les textes que je mets sur mon blog : je les extrais de livres, de films, de sites internet… bref de supports déjà publiés. Il s’agit juste de bien préciser l’auteur bien sûr.

      Quant à mes poèmes et commentaires, ils sont disponibles pour tous car je suis pour le partage libre des créations (du moment qu’on respecte leur forme, leur fond et qu’on indique leur source). C’est ainsi qu’une culture s’enrichit : l’important pour les êtres éphémères que nous sommes, c’est autant ce que nous apportons aux autres que ce que nous en recevons.

      Passez le bonjour à Pascal de ma part.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *