PAPA MOTO
Tête haute, regard déterminé,
Martin se prépare.
Il saisit son casque invisible,
l’enfile d’un geste court
et baisse la visière.
Il chausse ses bottes renforcées,
enfourche la selle de mes genoux,
et passe son doigt sous son nez
pour se rehausser d’une moustache de circonstance.
Il croise mes bras en guise de guidon,
index et majeurs tendus en poignées solides,
pouces ouverts en manettes de frein.
D’un appui ferme sur le cadran de ma montre,
il démarre son destrier mécanique.
Les cylindres vrombissent de ma bouche entrouverte.
Il attaque,
cabrant légèrement le bolide auquel il s’agrippe.
Puis, pif paf, enchaîne les virages énergiquement.
Quand, d’aventure, il enrhume d’autres motards
il appuie frénétiquement sur ma bague argentée
pour me faire klaxonner jusqu’aux rires.
Guillaume Riou, in Les Citadelles, revue de poésie, n°23, Paris, 2018-2019.