La légende de Saint-Nicolas est vieille de plusieurs siècles, mais c’est à un poème que nous devons le personnage célèbre de ce petit vieillard jovial et généreux, avec ses rennes et son traineau.
Le poète et théologien Clement Clarke Moore (1779-1863) écrit ce texte pour ses enfants en 1822 et le publie de manière anonyme dans le journal « Sentinel » de la ville de Troy (État de New-York) le 23 décembre 1823. Sans le savoir, il change alors la représentation de Noël pour des génération d’enfants à venir.
Face au succès de ce poème, une controverse apparaît ensuite aux États-Unis sur son véritable auteur. Les descendants d’Henry Livingston Junior, poète et agriculteur issu d’une famille influente de New York, affirment en effet qu’il a écrit le célèbre poème dès 1808…
Après avoir lu plusieurs articles sur le sujet et découvert les preuves mises en avant, je penche pour Clement Clarke Moore. Mais quel que soit le véritable auteur, il aurait mieux fait de le signer ; et après tout : c’est bien le poème qui compte et son influence sur les traditions.
A Visit from St. Nicholas
(The night before Christmas)
‘Twas the night before Christmas, when all thro’ the house,
Not a creature was stirring, not even a mouse ;
The stockings were hung by the chimney with care,
In hopes that St. Nicholas soon would be there ;
The children were nestled all snug in their beds,
While visions of sugar plums danc’d in their heads,
And Mama in her ‘kerchief, and I in my cap,
Had just settled our brains for a long winter’s nap –
When out on the lawn there arose such a clatter,
I sprang from my bed to see what was the matter.
Away to the window I flew like a flash,
Tore open the shutters, and threw up the sash.
The moon on the breast of the new fallen snow,
Gave a lustre of mid-day to objects below ;
When, what to my wondering eyes did appear,
But a miniature sleigh and eight tiny rein-deer,
With a little old driver, so lively and quick,
I knew in a moment he must be St. Nick.
More rapid than eagles his coursers they came,
And he whistled, and shouted, and call’d them by name :
« Now ! Dasher, now ! Dancer, now ! Prancer, and Vixen,
On ! Comet, on ! Cupid, on ! Dunder and Blixem ;
To the top of the porch ! to the top of the wall !
Now dash away! dash away ! dash away all ! »
As dry leaves before the wild hurricane fly,
When they meet with an obstacle, mount to the sky ;
So up to the house-top the coursers they flew,
With the sleigh full of toys, and St. Nicholas too :
And then, in a twinkling, I heard on the roof
The prancing and pawing of each little hoof.
As I drew in my head, and was turning around,
Down the chimney St. Nicholas came with a bound :
He was dress’d all in fur, from his head to his foot,
And his clothes were all tarnish’d with ashes and soot ;
A bundle of toys he had flung on his back,
And he look’d like a peddler just opening his pack :
His eyes – how they twinkled ! his dimples, how merry,
His cheeks were like roses, his nose like a cherry ;
His droll little mouth was drawn up like a bow,
And the beard on his chin was as white as the snow ;
The stump of a pipe he held tight in his teeth,
And the smoke, it encircled his head like a wreath.
He had a broad face, and a little round belly
That shook when he laugh’d, like a bowl full of jelly :
He was chubby and plump, a right jolly old elf,
And I laugh’d when I saw him, in spite of myself ;
A wink of his eye and a twist of his head
Soon gave me to know I had nothing to dread.
He spoke not a word, but went straight to his work,
And fill’d all the stockings ; then turn’d with a jirk,
And laying his finger aside of his nose
And giving a nod, up the chimney he rose.
He sprung to his sleigh, to his team gave a whistle,
And away they all flew like the down of a thistle :
But I heard him exclaim, ere he drove out of sight –
Happy Christmas to all, and to all a good night !
Clement Clarke Moore (1779-1863), in le journal Sentinel, Troy, du 23 décembre 1823.
La nuit de Noël
C’était la nuit de Noël
Dans la maison endormie
Pas un bruit, rien ne bougeait
Pas même la plus petite souris.
Les chaussettes devant la cheminée,
Avaient été soigneusement alignées.
Car chacun attendait
L’arrivée de Saint-Nicolas.
Les enfants dormaient
Bien au chaud dans leurs lits,
Des rêves de bonbons
Et de dragées plain la tête.
Maman sous sa charlotte
Et moi sous mon bonnet,
Nous venions de nous assoupir
Pour une longue nuit d’hiver.
Quand tout à coup,
Un tintamarre assourdissant
Me jette à bas du lit.
Que se passe-t-il devant la maison ?
En un clin d’œil
Me voilà à la fenêtre,
Je tire les rideaux,
Je soulève la vitre.
Sur la neige fraîchement tombée
Belle comme un tapis,
Toutes formes resplendissent
Comme en plein jour ;
Stupéfait et émerveillé,
Je vois surgir
Un minuscule traineau
Tiré par huit petits rennes,
Et l’attelage est conduit
Par un tout petit vieillard agile et vif.
Impossible de s’y tromper
C’est bien Saint-Nicolas !
Ses coursiers caracolaient
Plus rapides que des aigles
Et lui, sifflait et criait leurs noms
Pour stimuler leur galop :
« En avant, Danseur et Pimpant !
En avant, Espiègle et Fringant !
Du nerf, Comète ! Du nerf, Cupidon !
Plus vite, Éclair ! Plus vite, Tonnerre !
Sautons, sautons
Sur le porche, sur le mur,
Allons, dépêchons ! »
Et tout l’équipage s’envola
Sur le toit de la maison,
Emportant Saint-Nicolas
Et le traîneau débordant de jouets.
Et presque aussitôt,
J’entendis sur le toit
Gratter et piaffer
Leurs petits sabots.
À peine avais-je rentré la tête,
Je me retourne et je vois,
D’une enjambée Saint-Nicolas
Bondir hors de la cheminée.
Vêtu de fourrure,
De la tête aux pieds,
Ses habits salis
Par la cendre et la suie.
Il portait sur le dos
Un sac rempli de jouets,
On aurait dit un colporteur
Qui déballait sa marchandise.
Si vous l’aviez vu pétiller des yeux
Et rire de toutes ses fossettes !
Ses joues étaient comme des roses,
Et son nez avait l’air d’une cerise !
Sa drôle de petite bouche
Était retroussée comme un accent grave,
Et la barbe, sous son menton,
Aussi blanche que de la neige.
Il serrait entre ses dents
Le tuyau d’une pipe,
Et la fumée lui faisait
Comme un panache autour de la tête.
Il avait une figure ronde
Et un petit ventre rebondi
Qui ballottait lorsqu’il riait
Comme un bol rempli de confiture.
Rondouillard et joufflu
C’était vraiment un joyeux petit lutin,
Et je riais en l’observant
Sans pouvoir m’en empêcher.
D’un clin d’œil
Et d’un signe de tête
Il me laissa entendre
Que je n’avais rien à craindre.
Il ne proféra pas un mot,
Mais se mit à l’œuvre aussitôt.
Après avoir garni toutes les chaussettes
Il se retourna d’une saccade ;
Un doigt sur les lèvres,
Il me lança un coup d’œil amical
Et d’un seul bond
Il remonta dans la cheminée.
Il sauta dans son traineau,
Siffla son équipage
Et ils s’envolèrent
Comme le duvet d’un chardon.
Mais avant de disparaître,
Je l’entendis s’écrier :
« Joyeux Noël
Et bonne nuit à tous ! »
Clement Clarke Moore, in La nuit de Noël, Ed. Garnier, 1979.
Traduit de l’anglais par Michel Sineux. Illustré par Elisa Trimby.