Retraite en la terre des Allymes – Octonaires d’Antoine de Chandieu

Dans ses « Octonaires sur la vanité et inconstance du monde », Antoine de Chandieu (1534-1591) met en poèmes la course des saisons sur les domaines du château des Allymes (dans le Bugey) pour souligner la fuite du temps qui passe et les hommes avec…

J’ai longtemps cru que cette série de quatre octonaires étaient l’œuvre de Claude Le Jeune, sous le titre de « Retraite en la terre des Allymes ». Mais grâce au commentaire avisé de James Reid-Baxter, que vous pouvez lire après cet article, j’ai rendu à Antoine de Chandieu la paternité de ces poèmes.

Le compositeur Claude Le Jeune (XVIe siècle) avait en effet mis en musique les octonaires de Chandieu, mais n’en est pas l’auteur.

La retraite - Château des Allymes - peintographie Marius Bernard

Le château des Allymes – Peintographie de Marius Bernard

RETRAITE EN LA TERRE DES ALLYMES

Le printemps

Quand la terre au printemps prend sa verde couleur
Et l’arbre se revest d’une plus belle fleur,
Sa fleur est messagere
Du fruit que l’on espere.
Mondain, qui est sans fruit, combien que tu fleurisses,
En biens, en honneurs, en plaisirs et délices :
Ta fleur qui trompe et ment,
N’est qu’un jouet du vent.

L’été

L’esté ralumant ses feux,
Le laboureur tout joyeux,
Va récompenser sa peine
Du blond tresor de la plaine.
Mais qui au Monde s’adonne,
Et, discourant, souhaitant,
Ne seme rien que du vent,
Rien que du vent ne moissonne.

L’automne

Lorsque la fueille va mourant
Par l’Automne déshonorant
Avec sa laideur bazanée
Le beau visage de l’année :
C’est là un miroir de ta vie,
Ores vertes, et ores flestries,
Mondain, dont la vie s’enfuit
Sans laisser ny fueille ny fruit.

L’hiver

Vois-tu l’Hyver accroupi, hérissé
Et renfroigné de gelée et froidure :
Nous sommes tels, voilà notre figure
Quand le plus beau de nostre age est passé.
Après l’Hyver le Printemps recommence :
Mais toy, Mondain qui mets ton esperance
En ceste vie, et rien plus ne pretens,
Ton Hyver est sans espoir de Printemps.

Antoine de Chandieu, in Octonaires sur la vanité et inconstance du monde, XVIe siècle.

La retraite - Printemps par Coignot

Le printemps – Peinture de Cl. Coignot

RETIREMENT IN ALLYMES

Spring

When the earth in spring takes on its verdant hue
And the tree is clothed in its finest flower,
Its flower is the messenger
Of the hoped -for-fruit.
Worldly One, who has no fruit, how you flourish
In goods, in honour, in pleasure and delight :
Your flower which lies and deceives
Is but a toy in the wind.

Summer

The summer relighting its fires,
The labourer full of joy,
Goes to reward his pains
With the blond treasure of the plains.
But he who gives himself to the World,
And in talking and wishing
Sows nothing but wind,
Naught but what the wind reaps.

Autumn

When the leaf is dying
Dishonouring Autumn
With its ugly brown tints
The fine face of the year :
There is the mirror of your life,
Green leaves and faded leaves,
O Worldly One, whose life goes by
With no trace or either leaf or fruit.

Winter

See you Winter crouching there so rugged,
Frowning with frost and cold :
Thus are we, in your likeness
When the best of our age has passed.
After Winter the Spring returns :
But you, O Worldly One who put your hope
In this life, and claim no more
Your Winter has no hope of Spring.

Antoine de Chandieu, in Octonaires sur la vanité et inconstance du monde, XVIe siècle.


Clefs : Antoine de la Roche Chandieu | poète protestant
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2 Commentaires

  1. james reid-baxter

    Mais ce sont des octonaires VIII-XI tirés des « Cinquante octonaires de la vanité et inconstance du monde » d’Antoine de la Roche Chandieu, non pas des poèmes de la plume de Claude Le Jeune, qui n’en a fait qu’une mise en musique…

    • Bonjour.
      Merci pour votre commentaire et votre éclairage précieux.
      Après vérification, il s’agit en effet d’une méprise de ma part. J’ai découvert, il y a quelques années, ces poèmes par le biais des partitions du compositeur et les lui ai trop rapidement attribués…
      J’ai rectifié mon article.
      Bien cordialement

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