La plainte du Fou – Poème de Tancrède Martel

La plainte du Fou

 

Tout en humant, rempli d’une ivresse divine,
L’âcre et lourde senteur d’un beau rêve, ce soir
Je me suis élancé vers la gaze argentine
De l’Éther, ou plutôt je m’y suis laissé choir.
Je crois entendre, au fond de ma vaste poitrine,
De nombreux cavaliers, habillés de drap noir,
Hurler en galopant sur la poussière fine
De ce vaste désert qu’on appelle l’Espoir.

Ils vont, tourbillonnant dans une rage folle :
La lame fait claquer au vent sa banderole,
Et la rapière sonne en frappant le fourreau.

Chacun d’eux traîne ainsi, sans détourner la tête,
Un morceau de mon cœur au galop de sa bête ;
Et je n’en trouve aucun qui ne soit un bourreau.

 

Tancrède Martel (1856-1928), in Poèmes à tous crins, Ed. A. Lemerre, 1874. Et cité dans la revue Le monde poétique de 1887.

 

 

La plainte du FouCavalier de l’Apocalypse écorché d’Honoré Fragonard

Partager
Facebooktwitterredditpinterestlinkedintumblr
Lien pour marque-pages : Permaliens.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *