J’ai récemment eu le plaisir de rencontrer l’auteur-illustrateur Pef à la médiathèque Bonlieu d’Annecy. Invité de la saison culturelle en cours, il s’est lancé dans un marathon sans précédent : expos, rencontres littéraires, dédicaces.
Il m’a offert l’occasion de lier connaissance avec le poète breton Yvon Le Men, dont je partagerai avec vous sur ce blog quelques poèmes.
Haut en couleur et en spontanéité, il m’a baptisé « L’homme du lac » pour les poèmes sur Annecy, son lac et ses environs que je porte à la connaissance du plus grand nombre sur le site Annecy en poésie. Puis il m’a dédicacé un ouvrage, chiné sur Internet, que j’aime particulièrement car il associe avec humour la cuisine à la poésie : « Fablier de cuisine ».
On y découvre des fables où les situations funambulesques mènent habillement vers des morales inscrites dans la réalité de nos sociétés. Pef nous livre des poèmes amusants et satiriques qui peuvent être appréciés avec différents degrés de lecture, qu’on soit jeune ou moins jeune.
Voici l’une de ces fables, où McDo en prend pour son grade :
LE GÉNÉRAL ET LE RESTAURANT
À pied ou à dada
le général Mac Do,
celui de Waterloo,
offrait à ses soldats
un peu de pain volé
aux pauvres paysans
et de la viande hachée
par ses canons tonnant.
– Ah, il faut bien nourrir
tous ceux qui vont mourir,
confiait sans mystère
ce brave militaire.
La chère n’est pas chère,
quand on s’en va-t-en guerre !
De victoire en défaite
il fut mis en retraite
Que faire à soixante ans ?
– Ouvrir un restaurant
qui portera mon nom,
sacré nom d’un canon !
Là où la viande abonde
ça plaît à tout le monde.
Avec du pain mouillé
par la pluie, c’est prouvé,
pour faire un peu plus frais.
Et Mac Do d’ajouter :
– Il faut bien les nourrir,
tous ceux qui vont mourir
un peu plus tard, évidement,
c’est le seul changement.
N’ayant plus d’ennemis
je tire sur les prix
et par mansuétude
je reprends mes études.
À force de calculs
le résultat fut nul.
Ce qu’on mange au Mac Do
me fait froid dans le dos.
Le pain volé à la misère,
ce qu’on tue à la guerre,
dès la paix revenue,
coûtent plus d’un écu.
Pef, in Fablier de cuisine, Ed. Lo Païs, coll. d’Enfance, 1998.